Gabriel Marcel
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Gabriel Marcel est un philosophe, dramaturge et musicien français (Paris, 7 décembre 1889 - 8 octobre 1973) représentatif de l'existentialisme chrétien.
[modifier] La pensée marcellienne
Agrégé de philosophie (1912), Gabriel Marcel ne se lance pourtant pas dans une carrière d'enseignant, à laquelle il renonce dès 1923. Il a voulu comme le fit Jean-Paul Sartre se consacrer entièrement à sa vocation de philosophe. Il passera sa vie à approfondir ses intuitions premières qu'il reprendra sans cesse. Les expériences existentielles de Marcel, comme la mort de sa mère lorsqu'il avait quatre ans ou la perte de sa compagne en 1947, sont inséparables d'une œuvre philosophique basée sur la méditation de l'expérience humaine dans des formes aussi personnelles que son « Journal métaphysique » tenu au jour le jour. En 1929, sa conversion au catholicisme marque un tournant dans son œuvre et fait de Marcel le maître français de l'existentialisme chrétien.
Pour Marcel, l'existence est l'expérience unique de toute conscience. L'homme la découvre comme engagée dans un monde et en même temps comme limitée par ce monde. Cette conscience pose des problèmes : on ne peut la réduire à un mot ou à un concept déterminés. Cette difficulté à penser l'existence montre bien qu'elle ne se réduit pas à la spéculation : la difficulté à penser notamment autrui en témoigne. De là, Marcel tire sa distinction célèbre entre problème et mystère : « Le problème est quelque chose qui barre la route. Il est tout entier devant moi. Au contraire, le mystère est quelque chose où je me trouve engagé, dont l'essence est, par conséquent, de n'être pas tout entier devant moi » (Être et Avoir). L'existence sera donc de l'ordre du mystérieux incapable de connaissance précise et conceptualisable comme en témoigne la méthode même de Marcel : un non-système.
Marcel critique le cogito cartésien et l'on peut dire que cette critique est le point de départ de sa pensée de la « co-présence » ou de l'« intersubjectivité » marcellienne. Pour lui, Descartes enferme le moi dans sa propre coquille : le « je pense » est un carcan dont nous ne saurions nous défaire. Il pose un handicap majeur essentiellement pour une relation possible à autrui. Si nous suivons Descartes nous ne ferons que représenter autrui ou monologuer sur lui. À partir de là, nous traiterions l'autre comme un « lui ». C'est comme un « tu » qu'il faut le considérer, c'est-à-dire comme baignant dans une existence concrète.
Gabriel Marcel soutient donc la thèse que c'est par autrui qu'il faut passer tout d'abord pour revenir à soi : seul moyen pour saisir l'autre dans son originalité. Il est à rapprocher dans cette quête du mystère d'autrui d'Emmanuel Lévinas et de Martin Buber, philosophes et penseurs juifs, mais aussi, plus proche du christianisme de Karl Jaspers, une parenté (dans ce dernier cas) dont il s'est réclamée. Il a d'ailleurs aussi rencontré Lévinas dans sa vie, notamment lors d'un dialogue avec lui à l'Université Libre de Bruxelles en 1964.
[modifier] L'amour et la Mort
Il a écrit : Je rappellerai d’abord cette phrase d’un de mes personnages: aimer un être, c’est dire : toi, tu ne mourras pas. Mais quel peut être le sens exact de la portée d’une telle affirmation ? Elle ne se réduit sûrement pas à un vœu, à un optatif, elle présente bien plutôt le caractère d’une assurance prophétique... Qui pourrait se formuler exactement comme suit : quels que soient les changements survenus dans ce que j’ai sous les yeux, toi et moi, nous resterons ensemble ; l’événement qui est survenu et qui est de l’ordre de l’accident, ne peut rendre caduque la promesse d’éternité incluse dans notre amour... (Le Mystère de l’Être, tome II, Foi et réalité, Paris, Aubier, 1981, pp. 154-155). Ou encore (même référence) : Le seul problème essentiel est posé par le conflit de l'amour et de la mort. S'il y a en moi une certitude inébranlable, c'est qu'un monde déserté par l'amour ne peut que s'engloutir dans la mort, mais c'est aussi que là où l'amour persiste... la mort ne peut pas ne pas être en défénitive vaincue.... On lui rétorqua un jour, lors d'une communication qu'il faisait à la Société française de Philosophie, que Gabriel Marcel avait très peur de la mort de Gabriel Marcel, ce à quoi il répliqua : J'ai peur de la mort de l'être aimé par Gabriel Marcel.
[modifier] Œuvres
- Philosophie
- Existence et objectivité (1914
- Journal métaphysique (1914-1923). Paris, Gallimard, 1927.
- Être et avoir (1918-1933). Paris, Aubier, 1935.
- Du refus à l'invocation. Paris, Gallimard, 1940.
- Homo viator. Paris, Aubier, 1945.
- La Métaphysique de Royce. Paris, Aubier, 1945.
- Position et approches concrètes du mystère ontologique. Introduction par Marcel de Corte. Louvain, E. Nauwelaerts; Paris, Librairie philosophique J. Vrin, 1949.
- Le Mystère de l'être. Paris, Aubier, 1951. 2 vol.
- Les Hommes contre l'humain. Paris, La Colombe, 1951. Réédition: Fayard, 1968.
- Le Déclin de la sagesse. Paris, Plon, 1954.
- L'homme problématique. Paris, Aubier, 1955.
- Théâtre et religion. Lyon, Éditions E. Vitte, 1958.
- Présence et immortalité. Paris, Flammarion, 1959.
- La Dignité humaine. Paris, Aubier, 1964.
- Essai de philosophie concrète. Paris, NRF/Gallimard, 1967.
- Entretiens Paul Ricoeur, Gabriel Marcel. Paris, Aubier, 1968. Réédition: Présence de Gabriel Marcel, 1999.
- Pour une sagesse tragique et son au-delà. Paris, Plon, 1968.
- Coleridge et Schelling. Paris, Aubier, 1971.
- Gabriel Marcel interrogé par Pierre Boutang suivi de Position et approches concrètes du mystère ontologique. Paris, J.-M. Place Éditeur, 1977.
- Tu ne mourras pas. Textes choisis et présentés par Anne Marcel. Préface du P. Xavier Tilliette. Éditions Arfuyen, 2005.
- Théâtre
- Le Cœur des autres. Paris, Grasset, 1921.
- L'Iconoclaste. Paris, Stock, 1923.
- Un Homme de Dieu. Paris, Grasset, 1925.
- Le Monde cassé suivi de Position et approches concrètes du mystère ontologique. Paris, Desclée de Brouwer, 1933.
- Le Chemin de crête. Paris, Grasset, 1936.
- Le Dard. Paris, Plon, 1936.
- Le Fanal. Paris, Stock, 1936.
- La Soif . Paris, Desclée de Brouwer, 1938. Réédité sous le titre: Les cœurs avides, La Table Ronde, 1952.
- Théâtre comique : Colombyre ou le brasier de la paix - La double expertise - Les points sur les i - Le divertissement posthume. Paris, Albin Michel, 1947.
- Vers un autre Royaume : L'émissaire - Le signe de la croix. Paris, Plon, 1949.
- Rome n'est plus dans Rome. Paris, La Table Ronde, 1951.
- Croissez et multipliez. Paris, Plon, 1955.
- Mon temps n'est pas le vôtre. Paris, Plon, 1955.
- La dimension Florestan suivi de la conférence Le crépuscule du sens commun. Paris, Plon, 1958.
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