Cap Arcona
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Cap Arcona | ||
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Monument commémoratif du Cap Arcona dans le cimetière du souvenir à Neustadt en Holstein |
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Le Cap Arcona était un paquebot allemand de grand luxe, dont l'histoire est liée à l'une des deux plus grandes tragédies maritimes de la Seconde Guerre mondiale, donc de l'Histoire : le 3 mai 1945, il est coulé avec deux autres navires par l'aviation britannique alors qu’il transporte des milliers de déportés sortis du camp de concentration de Neuengamme.
Sommaire |
[modifier] Fierté de la marine allemande
Ce bateau à vapeur rapide appartenait à la HSDG, Hamburg-Südamerikanische Dampfschifffahrts Gesellschaft (entreprise de croisières entre Hambourg et l’Amérique du Sud). Construit par les chantiers Blohm und Voss de Hambourg, le Cap Arcona fut lancé le 14 mai 1927. D’une longueur de 206 mètres, d’un tonnage de 27 500 tonnes et doté de cales profondes, il était considéré comme l’un des plus beaux navires de son temps. Son nom, Cap Arcona, provient du Kap Arkona sur l’île allemande de Rügen (Mecklembourg-Poméranie occidentale). Ce vapeur servit aussi bien à des croisières de luxe qu’à l’émigration, principalement vers l’Amérique du Sud. Le 3 décembre 1928, à Rio de Janeiro, un hydravion transportant l’élite intellectuelle brésilienne et chargé d’accueillir Santos-Dumont, qui était à bord du Cap Arcona, s’échoua près du navire.
[modifier] Réquisition par la Kriegsmarine
Le navire fut réquisitionné par la Kriegsmarine le 25 août 1939. Il resta à quai dans le port de Gotenhafen, baie de Danzig (mer Baltique), Prusse orientale, servant de logement flottant aux troupes de la Kriegsmarine.
[modifier] Un intermède cinématographique
En 1942-43, un film de propagande nazie y fut tourné, Titanic (film de 1943).
En 1944, il reçut l'ordre de transporter des civils et des soldats entre Gotenhafen et Copenhague, mais ses turbines tombant en panne, il fut remorqué et réparé dans un chantier naval scandinave. Il fut restitué en mauvais état à la compagnie Hamburg-Süd le 14 avril 1945.
[modifier] Des prisons flottantes
Le même jour du 14 avril, Heinrich Himmler donne l'ordre de faire disparaître les déportés avant l'arrivée des Alliés. Le 4 mai, les Alliés libèrent donc un camp de Neuengamme vide, bien qu'il ait reçu 106 000 déportés à partir de 1938. C'est le gauleiter, chef SS du district de Hambourg, Karl Kaufmann qui fit diriger les déportés vers Lübeck, où se trouvaient le Cap Arcona et deux navires plus petits, le Thielbek et l'Athen, ainsi que le Deutschland.
Les capitaines du Cap Arcona, Heinrich Bertram, et du Thielbek, John Jacobsen, sont informés des projets nazis le 18 avril. Jacobsen est déchu de son commandement le 19. Dès le 20 commence l'embarquement sur les navires de 11 000 déportés arrivés à Lübeck entre le 19 et 26 avril, malgré les protestations de la Croix-Rouge suédoise. L'officier SS Gehrig ordonne au capitaine de l'Athen, Fritz Nobmann, d'embarquer 2300 déportés accompagnés de 280 SS et kapos et de les transférer au Cap Arcona, ancré à 4 km au large. Nobmann refuse, puis menacé de mort, s'exécute. Mais le commandant Bertram refuse le transbordement et l'Athen doit repartir au port. Ce n'est que le 26 sous la menace d'un jugement sommaire que Bertram doit se résoudre au transfert.
Sous le commandement du SS Kirstein, les gilets de sauvetage sont enlevés, alors que bancs et banquettes (possibles radeaux) sont stockés dans les cales, ce qui ne laisse aucun doute sur les projets allemands de couler le navire avec ses occupants. En plusieurs voyages jusqu'au 30 avril, 6500 déportés et 600 gardes sont amenés sur le Cap Arcona, où ils survivent dans des conditions atroces. On compte plusieurs dizaines de morts chaque jour. Le 30, des prisonniers sont enlevés du navire tant la surpopulation exaspère même les SS et en raison d'un accord avec la Croix-Rouge pour exfiltrer les déportés français vers les hôpitaux suédois. Mais arrivés du camp de concentration de Stutthof, 500 nouveaux déportés arrivent à Lübeck.
Le 3 mai, alors que des sous-marins allemands se préparent à torpiller les navires-prisons, des chars britanniques arrivent dans la ville et un avion de reconnaissance repère les navires. Deux officiers britanniques écoutent le rapport terrifiant de la Croix-Rouge et promettent d'agir, mais il est trop tard pour détourner l'attaque lancée par la RAF.
[modifier] La tragédie de Lübeck
Le 3 mai 1945 à 14 h 30, quatre jours après le suicide d’Hitler, le Cap Arcona, le liner de luxe allemand d’avant-guerre de 27 561 tonnes et de 206 mètres de long, le Thielbek (un cargo de 2 815 tonnes) l'Athen et le Deutschland (liner de 21 046 tonnes), ancrés dans la baie de Lübeck au large de Neustadt (Schleswig-Holstein) et Scharbeutz furent bombardés et coulés par des chasseurs-bombardiers Typhoons IB du Groupe 83 du Second Tactical Air Force de la RAF commandés par le capitaine Martin Scott Rumbold; parmi eux figurait le pilote français Pierre Clostermann qui, ironie de l'histoire, avait été à bord de la croisière inaugurale du Cap Arcona. Environ 7 000 à 8 000 déportés périrent noyés, les survivants nagèrent dans la mer Baltique glaciale puis furent mitraillés par les SS sur la plage.
À bord des deux premiers bateaux, plus de 7 500 déportés des camps de concentration de Neuengamme près de Hambourg et de Stutthof près de Danzig, dont une moitié étaient des prisonniers de guerre russes et polonais et d’autres français (résistants, réfractaires au STO, anciens STO, etc.), allemands (droit commun), danois, etc., ont été rapidement évacués de ces camps en face de l’avancée rapide des troupes britanniques. Arrivant dans le port de Lübeck, ils furent forcés de monter à bord de l' Athen (un cargo de 1 936 tonnes) pour être transférés dans le Cap Arcona dont le capitaine, Heinrich Bertram, refusa de les prendre à bord en protestant que son bateau ne pouvait en contenir que 700. Menacé de mise aux arrêts et d’exécution sommaire, il obéit et laissa 7 000 déportés être entassés par quelque 600 SS dans les cales profondes de son navire. Ces bateaux devaient être sortis en pleine mer puis sabordés, noyant tous ceux qui étaient à bord selon l’ordre d’Himmler indiquant à tous les commandants de camps de concentration qu’aucun déporté ne devait tomber vivant entre les mains de l'ennemi. Quand l'Athen eut finit son travail de transbordement, un groupe de déportés fut retransferré du Cap Arcona (qui était maintenant trop surpeuplé) à l'Athen. Le capitaine de ce dernier accostait alors son navire contre le quai de Neustadt et déployait un drapeau blanc, ce qui sauva 1 998 personnes. À une courte distance de là, le liner Deutschland était ancré et était en train d’être converti en navire-hôpital.
Tirant leurs roquettes, les Typhoons du 184 Squadron basé à Hustedt attaquèrent d’abord, touchant les trois bateaux. Les capitaines du Cap Arcona et du Thielbek firent déployer un drapeau blanc.
La seconde attaque vint du 198 Squadron basé à Plantlünne dirigé par le Group Captain Johnny Baldwin.
La troisième vint du 263 Squadron basé à Ahlhorn, l’escadrille attaqua le Deutschland et la quatrième attaque effectuée par le 197 Squadron basé aussi à Ahlhorn.
Le Deutschland, s’embrasa rapidement, la quille à l’air et coula quatre heures plus tard. Heureusement, il n’y avait aucun déporté à bord et l’équipage avait déserté le navire après la première attaque.
Le Cap Arcona, avec 4 650 déportés piégés en dessous dans les cales profondes suffoquèrent dans la fumée et les flammes, le navire s’inclina sur un côté, fut en partie submergé et s’embrasa. Quelques-uns des déportés réussirent à s’en extraire et à se cramponner à la coque du navire, d’autres sautèrent dans la mer Baltique glaciale. On a compté 316 rescapés.
Le Thielbek se transforma en épave où l’incendie couvait et coula quarante-cinq minutes plus tard. Du Thielbek, sur 2 800 déportés seulement 50 furent sauvés.
L'Athen ayant hissé le drapeau blanc, les 1 998 passagers furent épargnés.
Beaucoup de survivants, essayant de nager jusqu’à la plage, furent abattus dans l’eau par les mitrailleuses des Typhoons volant en rase-mottes et tournant autour des bateaux, d’autres par les unités de la SS, des Jeunesses hitlériennes, de l'infanterie de marine stationnées sur la plage. Les SS en barques épargnèrent uniquement ceux en uniforme SS, au moins 400.
Des photos (des navires en flamme; du Deutschland chavirant, du Thielbek, du Cap Arcona, de survivants nageant dans la Mer Baltique) furent prises lors d'une mission de reconnaissance au-dessus de la baie de Lübeck par un avion F-6 du 161ème Tactical Reconnaissance Squadron de l'USAAF vers 17 heures.
En tout, environ 8 000 personnes moururent dans cette tragédie (7 300 déportés et 600 SS), 314 déportés et 2 membres d’équipage furent sauvés. Les victimes ont été enterrées dans des fosses communes creusées entre Lübeck et Pelzerhaken. Les survivants ont fait construire un cénotaphe sur lequel est inscrit : "A la mémoire éternelle des déportés du camp de concentration de Neuengamme. Ils périrent lors du naufrage du Cap Arcona le 3 mai 1945.
Les pilotes de la RAF ne savaient pas qu’il y avait des déportés à bord et ce n’est que beaucoup d’années plus tard, en fait en 1975, que certains apprirent qu’ils avaient massacré des déportés des camps de concentration. Pendant des semaines après le naufrage, les corps des victimes furent ramenés par le courant sur la plage, ils furent rassemblés et enterrés dans de simples fosses communes à Neustadt en Holstein. Et pendant presque trois décennies, des squelettes et des morceaux de squelettes furent récupérés sur la plage, le dernier fut trouvé par un garçonnet âgé de douze ans en 1971. L’histoire de cette tragédie est dépeinte dans le musée du Cap Arcona de la ville de Neustadt in Holstein ouvert en 1990.
Ces déportés étaient de 28 nationalités différentes : allemande, américaine, belge, canadienne, danoise, espagnole, estonienne, française, grecque, helvétique, hongroise, italienne, lettonienne, lituanienne, luxembourgeoise, néerlandaise, norvégienne, polonaise, roumaine, russe, tchécoslovaque, ukrainienne, yougoslave, etc.
Le 4, la presse britannique titrait sur la "brillante attaque" de la RAF.
Ce naufrage fait partie, avec ceux du Wilhelm Gustloff et du Goya, qui eurent également lieu en 1945 dans la mer Baltique, des trois plus grandes pertes en vies humaines de l’histoire de la mer.
Les officiers SS de Neuengamme ont été jugés par des tribunaux militaires britanniques, mais aucun des responsables du transfert vers le Cap Arcona ne le fut. La question reste posée de savoir si des Britanniques ont pu avoir connaissance de la présence de déportés sur ces navires la veille de l'attaque, comme le prétend l'historien allemand Wilhelm Lange. Les archives militaires britanniques ne seront consultables qu'en 2045 !
Quant au navire Cap Arcona, son épave resta échouée dans la baie jusqu'en 1950, puis fut démantelée pour être réduite en ferrailles. La firme Rolls-Royce photographia ces restes en détail... pour évaluer l'efficacité de ses bombes.
[modifier] Bibliographie
- Angriffsziel « Cap Arcona », ISBN 3-88243-590-9 : Schwarberg, Günther : Göttingen : Steidl Verlag ;
- Cap Arcona, ISBN 3-923457-08-1 : Lange, Wilhelm : Eutin : Struves Buchdruckerei u. Verlag.
- Benjamin Jacobs/Eugene Pool — The 100-Year Secret : Britains's Hidden World War II Massacre — The Lyons Press, October 2004 [1]
- André Laroze, les Oubliés du "Cap Arcona". – Saint-Sever : André Laroze, 2005. – 149 p.-[3] p. de pl., 18 cm. – ISBN 2-911924-29-0.
- Franck Mazoyer, Alain Vancauwenberghe, et André Migdal, la Tragédie du Cap Arcona, in Le Monde diplomatique, août 2005. [2]
Extrait de l'encadré "Précisions" du Monde diplomatique du mois de septembre 2005 : "… Enfin, à la suite de la publication de "La tragédie du paquebot-prison Cap-Arcona" (Le Monde diplomatique, août 2005), nous avons reçu de M. A. V. un courrier estimant que cet article s'inspire largement d'un dossier publié sur son site : www.…. L'auteur, Franck Mazoyer, reconnait avoir fait "… Je ne pensais pas être si proche de son texte, j'en suis désolé". Le Monde diplomatique s'associe à ces excuses et signalera à ses internautes, lors de la mise en ligne de cet article, la contribution de M. V."
[modifier] Liens externes
- Histoire de la tragédie ;
- Photos du Thielbek et du Deutschland]
- La tragédie de Lübeck ;
- Site flash avec animation en audio (anglais, allemand) et montage de plusieurs photos de l'époque ;
- Photos du Cap Arcona : [3] [4] [5].
[modifier] Voir aussi
- Catastrophes ;
- Neustadt en Holstein.
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