Conjecture de Goldbach
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La conjecture de Goldbach est l'un des plus vieux problèmes non résolus de la théorie des nombres et des mathématiques. La conjecture s'énonce ainsi :
- Tout nombre entier pair supérieur à 2 peut être écrit comme la somme de deux nombres premiers.
(Le même nombre premier pouvant être utilisé deux fois. On rappelle qu'un nombre premier est par définition strictement supérieur à 1.)
Par exemple,
- 4 = 2 + 2
- 6 = 3 + 3
- 8 = 3 + 5
- 10 = 3 + 7 = 5 + 5
- 12 = 5 + 7
- 14 = 3 + 11 = 7 + 7
- etc.
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[modifier] Origine
En 1742, le mathématicien prussien Christian Goldbach écrivit une lettre au mathématicien suisse Leonhard Euler dans laquelle il proposait la conjecture suivante :
- Tout nombre supérieur à 5 peut être écrit comme une somme de trois nombres premiers.
Euler, intéressé par le problème, répondit avec la version plus forte de la conjecture :
- Tout nombre pair plus grand que deux peut être écrit comme une somme de deux nombres premiers.
La conjecture originale est connue de nos jours sous le nom conjecture faible de Goldbach, la suivante est la conjecture de Goldbach forte. Celle-ci était connue de René Descartes. La version forte implique la version faible, comme n'importe quel nombre plus grand que 5 peut être obtenu en ajoutant 3 à tout nombre plus grand que 2.
[modifier] Justification heuristique
La majorité des mathématiciens pensent que la conjecture est vraie, surtout sur des considérations statistiques axées sur la distribution probabiliste des nombres premiers : plus le nombre est grand, plus il y a de manières disponibles pour le représenter sous forme de somme de deux ou trois autres nombres, et la plus « compatible » devient celle pour qui au moins une de ces représentations est constituée entièrement de nombres premiers.
Une version très grossière de l'argument probabiliste heuristique (pour la forme forte de la conjecture de Goldbach) est la suivante. Le théorème des nombres premiers affirme qu'un entier m sélectionné aléatoirement d'une manière brute possède chance d'être premier. Ainsi, si n est un grand entier pair et m, un nombre compris entre 3 et n/2, alors on peut espérer la probabilité que m et n-m simultanément soient premiers à
- .
Cet argument heuristique n'est pas rigoureux pour de nombreuses raisons, par exemple, il est assuré que les éventualités que m et n-m soient premiers sont statistiquement indépendantes les unes des autres. Cependant, si on suit cet argument heuristique, on peut espérer que le nombre total de manières d'écrire un grand nombre entier pair n comme la somme de deux nombres premiers impairs grossièrement à
Puisque cette quantité tend vers l'infini lorque n augmente, nous pouvons espérer que chaque grand entier pair n'a pas qu'une seule représentation sous forme de somme de deux nombres premiers, mais en fait possède beaucoup plus de telles représentations.
L'argument heuristique ci-dessus est actuellement quelque peu imprécis, car il ignore certaines corrélations entre le likelihood de m et n-m soit premier. Par exemple, si m est impair alors n-m est aussi impair, et les nombres impairs sont de meilleurs candidats pour être premiers que les nombres pairs. De manière similaire, si n est divisible par 3, et m déjà un nombre premier distinct de 3, alors n-m serait aussi premier avec 3 et ainsi être légèrement plus convenable pour être premier qu'un nombre général. En poursuivant ce type d'analyse avec plus de soin, Hardy et Littlewood conjecturèrent en 1923 (en partie de leur célèbre conjecture des n-uplets premiers de Hardy-Littlewood) que pour tout c ≥ 2 fixé, le nombre de représentations d'un grand entier n sous la forme de somme de c premiers avec devrait être asymptotiquement égale à
où le produit couvre tous les nombres premiers p, et γc,p(n) est le nombre de solutions de l'équation en arithmétique modulaire, soumise aux contraintes . Cette formule a été rigoureusement démontrée comme étant asymptotiquement valide pour c ≥ 3 à partir du travail de Vinogradov, mais est seulement encore une conjecture lorsque c=2. Dans le dernier cas, la formule ci-dessus se simplifie à 0 lorsque n est impair, et à
lorsque n est pair, où Π2 est la constante des nombres premiers jumeaux
Cette formule asymptotique est quelquefois connue comme la conjecture étendue de Goldbach. La conjecture forte de Goldbach est en fait très similaire à la conjecture des nombres premiers jumeaux, et les deux conjectures sont reconnues comme étant globalement de difficulté comparable.
[modifier] État des recherches
Cette conjecture a fait l'objet de recherches par plusieurs théoriciens des nombres et a été vérifiée par ordinateur pour tous les nombres pairs jusqu'à : à la date du 26 décembre 2005.
Nous savons que tout nombre pair peut être écrit comme une somme d'au plus six nombres premiers. Comme conséquence du travail de Vinogradov, nous pouvons affirmer que tout nombre pair suffisamment grand peut être écrit comme la somme d'au plus quatre entiers premiers. Vinogradov a montré de plus que presque tout nombre pair peut être écrit comme la somme de deux nombres premiers (dans le sens que la proportion des nombres pairs qui peuvent s'écrire sous cette forme tend vers 1). En 1966, Chen Jing-run a montré que tout nombre pair suffisamment grand peut être écrit comme somme d'un nombre premier et d'un nombre avec au plus deux facteurs premiers.
Afin de faire de la publicité pour le livre Uncle Petros and Goldbach's Conjecture de Apostolos Doxiadis, l'éditeur britannique Tony Faber offrit un prix de 1 000 000 $ pour une preuve de la conjecture en 2000. Le prix ne pouvait être attribué qu'à la seule condition que la preuve soit soumise à la publication avant avril 2002. Le prix n'a jamais été réclamé.
[modifier] Lien avec le problème de l'arrêt
Soit un ordinateur (ou une machine de Turing) dont le programme entreprend de tester la conjecture de Goldbach tant qu'elle est vérifiée, et de s'arrêter au premier contre-exemple. Le code d'un tel programme aurait une taille finie (même s'il est bon de prévoir pour ses variables une taille indéfiniment extensible)
Si un examen du code nous permettait de dire si ce programme se termine ou pas, alors cela constituerait une démonstration assez inattendue de la conjecture en question.
Malheureusement, on démontre aussi que sous certaines conditions pourtant raisonnables on ne peut pas démontrer en un temps fini si un programme se termine ou pas, ce qui empêche cette forme de démonstration.
[modifier] Liens externes
- Projet de calcul distribué des nombres de Goldbach :Lien vers le projet
- Chris Caldwell: Goldbach's conjecture, extrait des pages sur les nombres premiers
- Anjana Ahuja: A million-dollar maths question, The Times of London, 16 mars 2000.
- Site coopératif en anglais de vérification de la conjecture de Goldbach.
- Les obstinations d'un mathématicien, roman rigolo autour de la conjecture de Goldbach écrit par Didier Nordon [1]
- Apostolos Doxiadis, Oncle Petros et la conjecture de Goldbach, Points Roman, Le Seuil, 2000